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  • Galway, 2050. Des années sont passées depuis la Grande Guerre opposant les êtres surnaturels de la région. Tous ont été découvert, tous ce sont battus pour le pouvoir et la liberté, jusqu’à ce qu’enfin, une paix fragile soit rétablie dans la ville. Tous se retrousse les manches pour reconstruire les quartiers et leurs habitations mais personne n’est dupe. Depuis l’arrivée des Sauveurs, ce groupuscule de croyants s’étant donné pour mission de décimer la population surnaturelle, les tensions sont d’autant plus forte. Personne n’ose leur résister de peur de ce qui pourrait se produire, même le Maire de la ville a bien du mal à faire face à ses nouveaux arrivants. Serez-vous pour ou contre leur révélation divine ? Que seriez-vous prêt à faire pour sauver votre cité ? Personne n’est à l’abri, personne ne sait ce qui va se passer. La tension monte. Serez-vous là pour prendre par à cette nouvelle ère ?

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    Neven E. Miller
    Neven E. Miller
    Vampires
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    Date d'inscription : 27/10/2019

    Night of the Hunter ♦ Azeven Empty Night of the Hunter ♦ Azeven

    Mer 6 Nov - 19:08
    Il a fallu un certain temps avant que je ne m’habitue à l’ambiance particulière de la forêt. Un certain temps avant que mes sens ne s’accoutument à la foule d’informations que les environnements me renvoient. A chaque fois qu’Az m’a traîné jusqu’ici, je me suis rapidement retrouvé avec l’odorat saturé et l’ouïe torturée d’acouphènes. Il y a beaucoup trop de saveurs et beaucoup trop de bruits dans l’air. L’odeur du sol, de l’humidité, de la végétation foisonnante et des dizaines d’animaux vivant sous ces bois produit un mélange étourdissant, que le vacarme de la faune terrestre et des oiseaux nocturnes vient couronner avec sournoiserie. Mais aussi déroutantes furent les premières expériences, ça a éveillé mon instinct de chasse. A chaque fois. Et ça, ça a quelque chose de fascinant. Ce besoin enfouit et viscéral de traquer. Ce besoin d’entendre le sang frais agiter le cœur d’un être vivant, ce besoin d’y goûter. Ce besoin de tuer.

    Accroupi derrière une marée de fougères, une main posée sur l’énorme tronc d’un arbre couvert de mousse, mes yeux suivent avec intérêt la progression d’un daim à travers la forêt. L’animal dévore sereinement les quelques brins d’herbe traversant le tapis de feuilles mortes, sans se douter de la présence d’un quelconque prédateur à proximité. Le vampire œuvre en moi. Il étire mes sens, choisi l’odeur qu’il veut sentir et les sons qu’il souhaite entendre. Le brouhaha constant s’en est allé, ignoré et reclus quelque part au fond de mon crâne. Je peux sentir le calme apaisé du daim, le parfum des plantes qui ont frôlé ses pattes durant sa promenade, et celui des jeunes pins qui ont effleurés ses flancs sur son passage. Je peux sentir la marque d’un vent de liberté sur son pelage moucheté. Enfin, je peux sentir le mouvement régulier de l’hémoglobine qui coule en litre dans cette gorge tendue vers le sol. Si proche. Si dévoilée. La bête exalte au fond de moi. Ma prise se raffermi contre l’écorce. Mes muscles se tendent, prêts à bondir vers ma proie à quelques mètres de là. C’est à ce moment précis qu’un craquement vif me crispe de haut en bas. Un craquement de bois, qui ne vient ni de moi, ni du daim. Ce dernier relève brusquement la tête vers une direction un peu plus à l’ouest de ma position. Je retiens mon souffle. J’le crois pas ! Il ne va quand même pas … ? Je me relève d’un bond.

    - Eh !

    L’animal panique. Sa queue éclate en panache avant qu’il ne s’apprête à sauter et s’enfuir loin d’ici. Mais je ne lui prête plus la moindre attention. L’indignation tape contre mes tempes. Je m’élance vers l’ouest, un quart de seconde avant que la silhouette d’Az ne fuse à travers l’espace. Son odeur me percute avant que nos corps ne se heurtent. Mais l’impact n’en est pas moins violent. Ma force de vampire coupe son élan surnaturel alors que je le fauche sur le côté. Mes bras se referment autour de lui. Nous tombons comme des masses sur le sol matelassé. Le chevreuil a disparu. Je gronde. Cet enfoiré a voulu me piquer ma proie sous mon nez. Encore ! Je me redresse, sourcils froncés, la mâchoire serrée, pour lui renvoyer un regard foudroyant.

    - Putain mais t’es infernal !

    La frustration du suceur de sang me prend à la gorge. Mais je préfère voir ma cible disparaître à tout jamais entre les fourrées plutôt que de la voir tuée par Az alors que j’étais à deux doigts d’y arriver.

    - T’es trop vieux peut-être ? Ta vue te fait défaut, t'as pas remarqué que j’étais déjà là ?

    L'attaque est facile, mais l'agacement bien présent. Foutu vieux vampire. Un feu de révolte brûle dans mon estomac vide. J’ai même pas besoin de lui poser la question. Je sais déjà que ça le fait marrer.
    Azenor de Castellane
    Azenor de Castellane
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    Night of the Hunter ♦ Azeven Empty Re: Night of the Hunter ♦ Azeven

    Mer 6 Nov - 19:09
    J’éclate de rire à même le sol, la tête plongée dans un amas de feuilles écrasé sous mon poids. Je ne peux pas m’en empêcher, c’est beaucoup trop tentant et bien trop drôle pour que je résiste à l’envie de lui piquer sa proie sous son nez. Juste pour avoir le plaisir de voir son regard me fusiller sur place. Mon rire se déploie autour de nous alors que je me retourne en sa direction, le piégeant dans mes bras, fier de mon effet, ignorant royalement sa petite pique concernant mon âge. Non, décidément, c’est bien plus drôle ainsi.

    « Et toi tu es bien trop lent mon petit chat ! Beaucoup, beaucoup trop lent pour rivaliser avec le vieux vampire que je suis ! »

    Mon regard le couvre d’amour, totalement amusé de la situation. Le rendre chèvre, c’est devenu ma spécialité, au fil des semaines. Et je ne changerais ça pour rien au monde. Mes doigts se glissent dans ses cheveux pour les ébouriffer avec tendresse, sachant parfaitement à quel point cela peut le faire enrager d’autant plus.

    « Je t’aime tu sais. »

    Mes lèvres encore souriantes s’écrasent contre les siennes. Je t’aime Neven. Et je sais que toi aussi, quelque part, même si là, maintenant, tout de suite, tu me détestes plus que tout de te faire encore ce même sale coup. A la réflexion, il faudrait peut-être que j’innove un peu. La prochaine fois, je le surprendrais dans son dos, juste pour le bonheur de le faire sursauter !

    Ma bouche se décolle rapidement de la sienne tandis que je lui sors le plus beau des sourires. Il a encore des progrès à faire, dans tous les cas. Ce que je dis n’est pas loin de la vérité. Mon amant est encore trop lent pour véritablement attraper ce genre de proie. Des lapins, à la rigueur...

    Le fil de mes pensées s’arrête brusquement. Mes yeux se plissent, les sens en alerte. Quelque chose à changé dans la forêt. Une présence... Nauséabonde me saute dessus, m’écrase en une fraction de seconde. Fini de jouer. Quelque chose cloche. Une odeur flotte dans les airs. Une odeur que je connais pour m’y être déjà heurtée par le passer. Mes oreilles frémissent. Je les entends. J’entends leurs voix, sent leurs présence inondant notre refuge. Ma prise se relâche immédiatement sur Neven, me retournant dans mon élan pour mieux me relever à demi, analysant les lieux qui nous entoure. Mon aura gronde, mes crocs titillent ma bouche, impatient de faire leur sortie alors que mon bras retient Neven derrière moi par réflexe. Je n’aime pas ça. Du tout.

    « Tu entends ? »

    Ils avancent, ils sont tout près, beaucoup trop prêts. Il faut que j’approche, que je les vois, pour mieux les éliminer. Cette odeur horrible, ses pas lourds sur le sol de la forêt, les branches qui craquent, leur voix résonnant en un murmure désagréable.

    « Des chasseurs. Ce sont des chasseurs de vampires. »

    Il n’y a pas de doute possible. Je sens d’ici l’odeur pestilentielle enrobant leurs armes. Ce fumet caractéristique qu’ils utilisent contre nous, l’une des seules matières capable de nous anéantir. Ils sont là pour nous. Ils nous traquent. Ils ont sentis notre présence, nous ont probablement entendus. Il ne faut pas qu’il trouve Neven. Surtout pas. Hors de question.

    Je grogne doucement, telle une bête prête à se défendre à tout moment avant de me retourner vers Neven. Mes mains atterrissent sur ses épaules au même moment où mon regard s’ancre au sien. Il faut agir, vite.

    « Ecoute moi bien. Ils ne faut pas qu’ils te trouvent, tu m’entends ? Sous aucun prétexte. Ne les laisse pas t’attraper. Surtout pas. Tu vas partir au nord, rejoindre la voiture et rentrer, compris ? Je te rejoins dès que j’en ai fini avec eux. »

    Je ne lui laisse pas le temps de répliquer, lui volant ses lèvres dans un dernier baiser sans lui laisser d’alternative. L’instant suivant, j’ai déjà disparu dans les fourrés, fonçant à la recherche du groupe que l’on peut clairement entendre à quelques mètres à peine. 

    Je prends de la vitesse, m’enfonce dans la forêt, me glisse entre les branches des arbres pour mieux pouvoir les observer. Je ne tarde pas à tomber dessus. Ils sont tout sauf discrets. Et armés jusqu’aux dents, se déplaçant doucement à travers notre bois. Je repère leur chef, le donneur d’ordres, vociférant ses mots à ses disciples. J’attends, tapis dans l’ombre, le bon moment pour agir, avant de leur bondir dessus pour les réduire en charpie, un à un. Maintenant !
    Neven E. Miller
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    Night of the Hunter ♦ Azeven Empty Re: Night of the Hunter ♦ Azeven

    Mer 6 Nov - 19:14
    Je grince des dents avec humeur, plus irrité encore de voir son hilarité et sa jovialité éclater au grand jour. Mais je ne sais pas exactement ce qui m’énerve le plus. Ce surnom qu’il m’adresse d’office ? Ou le fait que ses moqueries soient absolument fondées et marquées de vérité ? Je fronce les sourcils alors qu’il m’enferme dans ses bras, cherchant à peine à me débattre pour y échapper. Ce n’est pas comme si j’avais la moindre chance de m’enfuir. Je suis d'autant résigné que j’ai conscience que ça le ferait encore plus jubiler. Vieux vampire, vieux vampire. Sale crâneur ouais. Tout en lui transpire la tendresse et l’affection. C’est horripilant. Comment je suis censé l’envoyer chier s’il affiche une expression pareille ? On dirait que rien ne pourrait l’atteindre à cet instant, pas même mes piques acerbes. « Je t’aime tu sais ». Il me dérobe mes lèvres, sans s’attarder sur mon avis et encore moins sur mon humeur. Et malgré moi, je m’adoucis. Oui … bien sûr que je sais.

    - Je ne suis pas lent. Tu as juste un peu plus d’entraînement que moi. Et c’est pas une raison pour autant la ramener.

    Je ronchonne, grognon à l’idée de m’être encore fait avoir par ses petits jeux énervants, mais bien moins vindicatif que je l’aurais souhaité. Mais quelque chose change brusquement dans son attitude. L’évolution nette et brutale de son aura me contamine aussitôt. Mes muscles se tendent d’instinct. Les rides mécontentes de mon visage s’effacent, pour laisser place à une once d’inquiétude chargée d’incompréhension. En un coup de vent, Az me relâche et se redresse. Mes yeux courent sur son dos, perdu quant à ce revirement de comportement. Une colère froide et chargée de crainte grandit en lui. Ça m’impacte de tout son poids, de plus en plus palpable. En même temps, quelque chose de sombre et de menaçant émane progressivement de son être. Je me redresse précipitamment sur mes bras.

    - Que …

    Je n’ai pas l’occasion de répondre à sa question. Celle-ci prend soudainement tout son sens. La présence nocive et bruyante d’un regroupement d’humains chahute mes tympans. Le souffle court, je me crispe un peu plus. La part animale s’agite et feule en moi. Tout me souffle d’instinct que ce qui arrive sur nous n’a rien de bon.

    - Des quoi ?

    Mes mots se perdent dans mon murmure. Mais je n’attends aucune réponse. J’ai parfaitement compris. J’ai parfaitement saisi. La lourdeur de cette révélation s’abat sur moi. Je me relève pour le rejoindre, de plus en plus alarmé par l’étrange état dans lequel Az s’enfonce. Celui du prédateur. A la différence que cette fois, ça n’a plus rien d’un jeu. Le fauve qui sommeille en lui n’attaque pas pour se nourrir. Ni pour réparer mes conneries. Cette fois, il s’éveille pour repousser un danger. Quelque chose d’assez gros et de suffisamment redoutable pour faire surgir cette part obscure que je n’ai que rarement aperçu. Je lutte contre le frémissement qui menace de m’ébranler tout entier et romps la distance. Ma main se lève pour attraper son épaule.

    - Tu ne m’as jamais parlé de …

    Son bras m’intercepte avant que je ne l’atteigne, m’enjoignant silencieusement de rester en retrait. Je me fige. Ma gorge se noue, sans que je ne puisse rien y faire. Le bleu de ses yeux ne tarde pas à venir se fondre au fond des miens. Mon organe vital s’agite inconsciemment contre mon torse. J’y lis tout le sérieux de la situation, et aussitôt, une anxiété glacée se répand à l’intérieur de mon ventre. Ses ordres fusent, autoritaires, implacables. Ne pas se laisser attraper. Courir vers le nord. Rentrer à la maison. J’ai envie de m’y accrocher aveuglément, mais quelque chose me broie le cœur. « Je te rejoins dès que j’en ai fini avec eux » . L’inquiétude éclate. Non. Non. Non. Reste avec moi. Pars avec moi. Je me sens déchiré de l’intérieur en l’espace d’une fraction de seconde. Torturé entre ma part vampire qui agonise à l’idée de désobéir à son créateur et ma part humaine qui refuse de voir l’homme que j’aime partir à la rencontre d’un ennemi mortel. Chasseurs de vampires. Et pourtant avant même de penser à le retenir, je sais au fond de moi que fuir ne suffira pas. Il faut les arrêter. Ces êtres sont comme nous. Des traqueurs. Qui cherchent leurs proies, jusqu’au bout. Les lèvres d’Az s’abattent sur les miennes. Je ferme les yeux avec force, imprime la saveur de ce contact dans mon crâne. Mais il disparaît bien vite. Trop vite. Un souffle emporte Az, me laissant seul. Seul, avec l’impression de sentir cette chose dans ma poitrine se compresser de l'intérieur.

    Un souffle fébrile passe à travers ma bouche. Mais je ne le sens même pas partir. Comme si j’étais déconnecté de moi-même, alors que mon regard reste figé à l’endroit où Az a disparu. Je refuse de penser à ce qui pourrait se passer. Je refuse de penser à l’hypothèse où il ne reviendrait pas. Il me rejoindra dès qu’il en aura fini avec eux. Il n’y a pas d’autres alternatives envisageables. Un bourdonnement sourd zone à mes oreilles. Le temps semble s’écouler au ralenti alors que je tourne les talons, droit vers le nord. Je m’élance sans chercher à réfléchir, et soudain, tout repart à une vitesse vertigineuse. Je fuse à toute allure à travers la forêt. Ne pas se laisser attraper. Courir vers le nord. Rentrer à la maison. Mes baskets touchent à peine le parterre de feuilles alors que je cavale à en perdre haleine. Rejoindre la voiture. Rentrer à la maison. Rentre à la maison. Je t’en supplie. Rentre à la maison Az. Les arbres défilent beaucoup trop vite autour de moi. La densité de la forêt ne tarde pas à changer. Je sais que j’approche de la sortie. La Ferrari n’est plus qu’à une poignée de pas. Je reste fixé sur mon objectif, tout pour m’empêcher de trop penser. Tout pour ne pas faire demi-tour. Et c’est là que l’ampleur de la dangerosité des chasseurs me percute en pleine face.

    Leur odeur passe comme un spectre à travers mon odorat saturé. Sans que je ne le sente venir, le piège apparaît subitement. Un épais fil barbelé jaillit des feuillages et se dresse solidement en travers de mon chemin, un quart de seconde avant que je ne le percute. L’impact me coupe le souffle. Me brise en pleine course. Le fil me scie les jambes. Je chute en avant avec la force d’un boulet de canon lancé à pleine vitesse. Mon corps se fracasse contre le sol avant que je ne comprenne ce qui se passe. Je mords la poussière. Dans le sens littéral du terme. La douleur explose dans la chair à vif de mes tibias. Je cherche mon air. Mes yeux se rouvrent. L’instant d’après, un réflexe surnaturel me fait rouler sur le côté. Le tranchant de l’arme que je viens d’éviter s’abat sur la terre meuble. Mon esprit voit trouble. Peine à comprendre ce qui se passe. Le vampire en moi prend le dessus. Je bondis maladroitement sur mes pieds. Mes crocs piquent l’intérieur de ma lèvre. Une odeur métallique me grille les papilles. Je me détourne pour détaler comme un fou. L’étreinte violente d’un poing américain me cogne en plein visage. La force du coup me fait repartir en arrière. Mon équilibre se rompt pour de bon. Le sol m’accueille de nouveau. Ne pas se laisser attraper. Ne pas se laisser attraper. Mon sang bat à tout allure contre mes tempes. La douleur tonne à travers mon corps comme un orage lointain. J’évolue dans un brouillard opaque. Réveille-toi bon sang, réveille-toi ! Je roule piteusement sur le flanc, cherchant de nouveau à me relever. Des rires gras et mesquins m’encerclent. Je sens leur présence qui se resserre, bien que je sois toujours incapable de définir combien ils sont exactement. Ces deux derniers chocs m’ont beaucoup trop étourdi.

    - C’était un sacré vol plané ça. Depuis quand elles savent voler, ces sangsues ?

    Je crache la marre d’hémoglobine qui me noie la bouche. Mes canines m’ont charcuté les gencives, le coup de poing ayant franchement aidé dans la manœuvre.

    - Va te faire foutre.

    Je gronde ma rancœur, comme je sais si bien le faire. Le seul bouclier que j’ai réussi à dresser de manière perpétuelle entre moi et les fils de pute de ce monde.

    - Oh ! Mais il sait parler !

    Cette même voix moqueuse, encore. Insupportable. Le vampire dans mes tripes fulmine et ne désire plus qu’une chose. Arracher la carotide logée derrière la peau de son cou.

    - Arrête Alan, on devrait le tuer tout de suite.
    - Détends-toi Jess. Ça, tu vois, c’est un bébé vampire. Il n’a aucune chance de s’en réchapper. Regarde.

    Je perçois des pas qui s’approchent. Et bien vite, le bout dur d’une chaussure vient me perforer l’estomac. L’oxygène quitte mes poumons. Je repars en sens arrière, bouffant encore un peu plus l’humus terreux de la forêt. L’air me manque cruellement. De nouveaux rires éclatent dans l’espace.

    - Tu vois ! Aussi fragile qu’un chiot !

    Je vais te tuer Alan. Je vais te tuer. Chasseur de vampire ou pas.
    La fureur sourde lève subitement le voile grisâtre qui m’aveuglait l’esprit. Je comprends mieux maintenant. Beaucoup mieux. Ce groupe de chasseurs trop bruyants au sud. Ce guet-apens savamment dissimulé au nord, non loin de la voiture. Tout était prévu. Tout était prémédité, soigneusement préparé. Ces fumiers ont resserré leur filet, pas à pas, sans que ni Az ni moi ne sente la menace approcher. Un instinct profond et sauvage me fait me remettre sur pied. Je saute vivement sur le battement de cœur le plus proche. Ma poigne s’abat sur la gorge d’un homme. Je la serre violemment avant de l’écarter de mon chemin en l’envoyant se fracasser contre le tronc massif d’un arbre. Je crois que quelque chose se brise en lui. Mais j’ignore à quel moment cela intervient, entre la force de ma prise et la brutalité de mon geste pour le repousser. Un claquement retentit dans l’air. Le sillage brûlant d’une balle m’érafle la joue. Le bruit me percute, la chaleur me fige. Je me revoie quelque mois plus tôt, couvert de sang, touché par le flingue d’un des deux types qui m’ont saigné comme un animal. Putain. Ça sent l’argent. Et c’est vraiment pas passé loin. Je croise brièvement le regard d’une femme, un fusil entre les mains. Jess probablement. La dureté que je perçois au fond de ses yeux m’ôte de tout doute. Il faut que je me casse. Si je cesse de bouger, je suis mort. Mais c’est déjà trop tard. La lame d’un couteau s’invite crûment dans l’arrière de ma cuisse. Je crie. Le métal qui perce ma chair me fait l’effet d’être brûlé vif. Une souffrance phénoménale me fait perdre le fil de nouveau. Ils sont beaucoup trop rapides. Beaucoup trop préparés à ce genre d’affrontement. On me fait tomber à genou. Des mains entravent mes bras et les tirent en arrière. D’autres saisissent mes cheveux pour me faire relever la tête. Dégager mon cou. Dévoiler l’un des points faibles du vampire.

    - Tranche-lui la tête, maintenant !

    La voix vient de mon dos. Mais je devine plus ou moins qu’il y en a un autre juste devant moi. Je croise brièvement l’éclat argenté de la longue lame aiguisée qu’il manipule. La douleur ne me grille pas suffisamment les idées pour m’empêcher de comprendre ce qui va se passer. Je vais mourir. Ils vont me tuer. La peur me saisit tout entier. J’ai échoué.
    Azenor de Castellane
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    Night of the Hunter ♦ Azeven Empty Re: Night of the Hunter ♦ Azeven

    Mer 6 Nov - 19:14
    Je me jette sur mon premier adversaire sans la moindre hésitation, mes crocs se plantant furieusement dans sa gorge, sectionnant sa jugulaire dans un bruit sinistre, faisant éclater ses hurlements douleur en un instant. Il n'a pas le temps de réaliser, d'essayer de me repousser qu'il s'effondre déjà à mes pieds, raide mort, se vidant du reste de son sang. Je repars aussitôt me camoufler dans les fourrés. Le reste de l'équipe s'agite, ils me cherchent, me traque à travers les bois. Je suis plus rapide, saute, bondit, disparait pour mieux réapparaitre dans le dos d'un autre se présentant à moi. J'esquive les balles que j'entends siffler à mes oreilles, me protège des coups pleuvant bientôt à mon encontre en me glissant derrière ma victime déjà foutue, criblée d'une multitude de balles en argent. Je grogne ma fureur, jette le cadavre encore frais sur mes assaillants pour mieux me glisser jusqu'au suivant. Je les aurais tous, tous, jusqu'au dernier ! Aucun d'entre eux ne s'en prendra à Neven, aucun n'en aura même l'opportunité de toucher à ne serait-ce qu'un de ses cheveux. J'en fais le serment. Ils ne l'auront pas, ne le rattraperons jamais. Cours Neven. Cours. Sans te retourner. N'y pense même pas. Cours pour ta vie. Je sais que je ne supporterais pas de le perdre. Je sais ce dont ces monstres sont capables. Je sais à quel point ils sont vils et cruels, sans le moindre état d'âme. Je n'aurais de répit que lorsque je serais certains qu'il n'y aura plus aucun danger. Qu'il ne craindra plus rien. 

    J'esquive les coups, plante rageusement mes crocs dans les gorges des chasseurs sans répit, me laissant envahir par l'odeur du sang éclatant dans l'air, s'engouffrant à flots dans ma gorge. C'est un véritable carnage, jusqu'à ce qu'enfin, lorsqu'il n'en reste qu'un, leur chef, je m'arrête pour lui faire face. Ma bouche dégouline d'émoglobine, mes lèvres en sont imbibées, avide d'en finir, d'en avoir plus, comme si tous les corps sans vie qui nous entoure étaient suffisant. Je grogne de fureur, tel une bête protégeant son bien le plus précieux, sa famille, l'amour de sa vie. 

    " Rappelle tes hommes, chasseur, avant que je les anéantissent tous ! J'apprends à mon nouveau-né à se contenter du sang animal. Jamais il ne touchera un humain. "

    Car c'est bien pour cela qu'ils nous chassent, n'est-ce-pas ? Nous empêcher de tuer, de nous nourrir de simple mortel. Ce que j'ai toujours interdit à Neven. Pour ne pas le laisser avoir la moindre tentation. Sauf ce soir là, lorsque je lui avais offert sa toute première proie, que j'avais moi-même goûtée, pour le mettre en confiance. Cet homme était toujours vivant, à l'heure actuelle. Et depuis, il n'y en avais plus eu. Pas une fois.
    Le chasseur me faisant face se voula réceptif à mes paroles. Du moins, surpris que je tente de lui parler. Je cru, durant une fraction de seconde, qu'il se rétracterait et m'écouterait. Ce fut une grave erreur. L'instant suivant, un rictus à la fois amusé et méprisant se mua sur ses lèvres, juste avant qu'elles ne s'ouvrent pour me répondre.

    " Tu as intérêt à courir vite, si tu veux sauver ton ami. "

    Mes yeux s'écarquillèrent d'effroi en comprenant ses paroles. Neven. Non ! NON ! En un bond, je m'élançais dans la forêt, le coeur battant à tout rompre dans ma poitrine. J'entends à peine le rire sinistre de l'homme que je laisse en vie. Non, non, non, non ! Tout mais pas ça ! Pas ça !

    " Neven ! Tiens bon ! J'arrive ! Ne les laisse pas te prendre, je t'en supplie ! "

    Je priais pour qu'il ne soit pas trop tard. Pour courir assez vite. Je n'avais jamais couru aussi vite de toute ma vie. Les arbres défilaient à une vitesse folle à mes côtés tandis que je remontais les bois droit vers le nord. Réponds mon dieu ! Réponds ! Ne me laisse pas seul ! Ne te laisse pas faire ! Je t'en prie ! Une boule horrible se forma dans ma gorge, la seule idée de le perdre m'était tellement insupportable qu'elle me vrillait totalement la moindre pensée raisonnable. Le sauver, c'est tout ce qui importait. Arriver à temps, les arrêter. Pitié, faites qu'il ne soit pas trop tard.

    Un cri déchira le silence de la nuit. A faire glacer mon sang bouillonnant dans mes veines. Le sien ! J'accélérais encore la cadence, courrait à en perdre toute notion du temps. Mon regard l'accrocha, lui et cet homme qui lui maintenait la tête. J'apperçu la lame si proche de sa gorge. Je bondis en une seconde, lachant un grognement de fureur digne de l'instinct bestial et totalement incontrôlable qui m'habitait. Ma main s'abattit sur l'homme tenant la lame faite d'argent, lui arrachant la tête dans mon élan, sans la moindre difficulté, avant de se planter dans la cage thoracique de l'autre, lacérant son torse, faisant craquer ses os pour atteindre son coeur que j'extirpais au passage. J'entendais les cris d'agonie se mêler à ceux des autres à seulement quelques mètres à peine. 

    " Tuez-les ! Vite ! Tuez-les ! "

    Ma main libre attrapa mon amant, l'emportant avec moi en un souffle, fuyant le guet-apent dans lequel il s'était fait piégé pour l'emmener à l'abri des regards, derrière le tronc d'un énorme chène. Je l'y plaquais sans douceur, examinant rapidement ses blessures, m'assurant qu'il n'avait rien de grâve. Mon coeur battait encore à tout rompre dans ma poitrine, mené par l'adrénaline, la peur de le perdre, le soulagement d'être arrivé à temps. De justesse.

    Une balle traversa l'écorse du tronc pour venir se loger droit dans mon épaule, m'arrachant un cri de douleur au passage, me faisant reculer d'un mètre. Ma rage redoubla de plus belle, mes crocs s'extirpèrent de ma bouche alors que je délaissai Neven, revenant dans la mêlée sans attendre. Je fonçais sur le premier humain à ma portée, l'envoyant valser dans les airs, le laissant s'écraser contre une branche qui me transperça de part en part. J'esquivai les coups, me glissai jusqu'à mes proies, faisant gicler leur sang dans les feuilles à mes pieds, sur mon visage. Tous périraient, des manières les plus horrible qui soient, sous mes crocs et mes mains arrachant leurs tripes dont je me servais ensuite pour les pendre. 
    Totalement hors de contrôle, seul le vampire assoiffé de sang, enragé à en perdre la tête menait chacun de mes gestes jusqu'à leur destruction. 

    Grisé par le sang glissant dans ma gorge, sur mes lèvres, jusque dans mes cheveux, je ne sentis par le coup en traitre venir. Une lame me transperça en un coup, m'arrachant un cri, me coupant le souffle. Mon regard s'abaisse sur la pointe de la lame que j'aperçois au niveau de mon ventre. Je crache du sang, relâchant le cadavre dont je viens rompre le coup pour me tourner vers le dernier rescapé. Le dernier encore en vie. Mon regard l'agrippe, lui qui ne semble comprendre pourquoi je ne tombe pas, pourquoi je ne meurs pas sur l'instant. Les yeux exorbités, il tente de s'éloigner, de s'extraire de ma prise se refermant sur lui. Je happe son cou de mes dents, arrache sa chair, le laissant retomber au sol l'instant suivant. C'est fini. C'est fini. 

    L'adrénaline me quitte brutalement. Je m'effondre, genou à terre. Je vois trouble, ma tête me tourne violemment. La main au sol, je m'appuie contre les feuilles mouillées de mon sang. C'est fini. Je l'ai sauvé. Neven. Je vais mourir. Je sens mes forces me quitter au fur et à mesure que les secondes s'étirent dans le temps. Je ne m'en sortirais pas. Pas cette fois.
    Neven E. Miller
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    Night of the Hunter ♦ Azeven Empty Re: Night of the Hunter ♦ Azeven

    Mer 6 Nov - 19:17
    La lame disparaît dans une bourrasque de vent brutale et meurtrière. L’odeur d’Az me percute juste avant celle du sang. Une panique générale se répand parmi les chasseurs. Les prises de ceux qui me maintiennent les bras et la tête disparaissent. Mes mains me retiennent avant que je ne m’étale face contre terre. Je me démène pour me relever, le cœur agité par l’instinct de survie. La poigne de mon vampire se referme sur mon bras. Le parfum mortuaire qu’il porte me frappe presque aussi fortement que le tronc d’arbre auquel il me plaque. Les yeux d’Az se dévoilent devant moi. Je reste essoufflé, peinant franchement à y croire. Il est là bon sang. J’ai cru que plus jamais je ne le reverrais. J’ai cru qu’ils allaient le tuer. J’ai cru qu’ils allaient me tuer. Il m’a sauvé la vie. Une fois de plus. Une panique sourde s’éveille de nouveau dans le creux de mon ventre. Il faut se barrer d’ici putain. Tout de suite ! Ces gars sont de grands malades. Ils sont surentraînés, ils sont taillés pour abattre du vampire. Mes doigts cherchent à l’agripper alors qu’il étudie rapidement mes blessures. On s’en fou de ça ! Il faut qu’on disparaisse de là ! L’écorce du tronc vole en éclat à quelques malheureux centimètres de mon être. L’irruption brusque et violente de la menace secoue mes réflexes surnaturels. Mes canines jaillissent de nouveau alors que je grogne, les yeux irrités par les particules de bois qui fusent dans les airs. Mais le cri d’Az me fait forcer sur ma vue pour ne pas le lâcher du regard. L’expression froide et déterminée qu’il affiche me tord les tripes et m’alerte plus encore. Je retrouve enfin assez d’air pour parler.

    - Il faut qu’on … Non ! Attends !

    Mes mains frôlent sa veste. Mais elles se referment dans le vide. Je n’ai pas réussi à le retenir. Une peur monstrueuse s’abat comme un torrent froid sur mes épaules. Mon estomac se retourne et mon cœur se déchire. N’y retourne pas, putain ! Non, non, non ! Ma gorge se noud sévèrement. Je pourrais chialer tellement j’ai la trouille de ce qui va se passer. L’urgence pulse à toute allure dans mes veines. Les hurlements reprennent de plus bel dans la forêt. Je m’appuie contre l’arbre. Je serre les dents et ferment durement les yeux avant d’arracher d’un geste vif le couteau d’argent qui me saigne la cuisse. Je halète un instant et le jette avec dégoût. L’étau de douleur qui enserrait mon esprit se dissipe alors progressivement. La plaie continue d’irradier, mais je sens déjà mon corps faire son œuvre pour guérir de lui-même. Je prends une grande inspiration et rassemble toute la force de mon courage désespéré. S’il faut crever ce soir, autant que ça soit aux côtés de mon amant. La colère gronde dans le creux de mon ventre. Je contourne vivement le tronc massif, prêt à affronter ces fils de chien. Mais le spectacle que je découvre me fige sur place.

    Je m’attendais à l’odeur de la haine et de la mort. Je m’attendais au rouge, à la souffrance, aux cris d’agonie. Mais pas de cette manière-là. Les cadavres des chasseurs s’amassent entre les arbres. Les balles jaillissent. Les lames vibrent dans l’air. Mais Az reste insaisissable. Je le vois évoluer sous mon regard éberlué. Il évite chaque coup, chaque attaque. Pour mieux répandre des corps dans son sillage macabre. La précision de ses gestes et la violence calculée de ses actions me pétrifient dans une morbide fascination. C’est impressionnant et terriblement effrayant. La chair vole et le sang éclate autour de lui. Il est couvert d’hémoglobine. Jamais je ne l’avais vu comme ça. Jamais je n’avais même pensé à l’imaginer comme ça. Une once d’incompréhension ondule en moi.

    Et puis mon regard accroche subitement cette ombre dangereuse qui se dresse dans son dos. La vie se fige dans chaque fibre de mon être. Le temps s’alourdit beaucoup trop lentement alors que je vois le chasseur lever son arme vers Az. Mes jambes foncent à travers les bois. Mais quelque chose au fond de moi sait déjà que c’est trop tard. Ce pressentiment primitif et viscéral qui m’avait étouffé lorsqu’il m’avait glissé entre les doigts pour retourner dans la mêlée.

    - AZ ! NON !

    La lame le traverse de part et d’autre. Le cadavre convulsant du chasseur s’abat contre le parterre de feuilles rougi. Le vampire met un genou au sol. A cet instant j’arrive avec fracas à ses côtés. Mes mains saisissent son visage poisseux de sang.

    - Az, putain, je t’en supplie, réponds-moi !

    Je le force à relever la tête. Je croise son regard lointain qui peine à se focaliser sur quelque chose. L’effroi me crispe tout entier. Mon cœur tambourine comme un acouphène sourd et écrasant contre mes tympans. C’est pas possible. Non, c’est pas possible. Pas ça, pas ça, pas ça putain !

    - Reste avec moi d’accord ?! Tu restes avec moi !

    Mes doigts sont pris d’un tremblement effrayé et incontrôlable alors que la panique me gagne pour de bon. J’avise la pointe de l’épée qui lui traverse l’abdomen. Un soubresaut me saisit. Les larmes me brouillent la vue. Mais je refuse putain. Je refuse de céder à l’évidence que mon inconscient semble accepter aussi facilement. T’as pas le droit de mourir ici. Je te l’interdis ! Je me relève à la hâte. Mes mains courent sur son dos. Je ne cherche même plus à réfléchir alors que je retire vivement l’arme de son corps. Un sanglot que je refuse de laisser passer m’étouffe tandis qu’Az réagit à la douleur. Mon bras balance au hasard l’objet répugnant. Le sang jaillit de la blessure béante. La situation m’échappe. L’état du vampire est dramatiquement grave.

    - Non, non, non, non, non …

    Ma langue s’anime en murmures, plus par réflexe pour m’empêcher de céder à l’épouvante. Je me déleste précipitamment de ma veste, puis de mon t-shirt. J’ignore ce que je fais. Je n’en ai pas la moindre foutue idée. C’est instinctif. C’est désespéré. J’peux pas rester là à le regarder mourir sans rien faire. Je déchire le vêtement en une grande bande de tissu. Mes doigts agités l’enroulent et le serrent alors autour de la plaie. Faut que le sang arrête de quitter son corps bordel ! Il le faut vraiment.

    - Tu m’entends ? Az ? Je te ramène à la maison d’accord ?

    Du revers de la main, j’essuie rageusement les larmes qui bordent mes paupières. Je l’attrape pour le redresser, mais au dernier instant je ne résiste pas au besoin de le serrer furieusement contre moi. Parce que cette fois, la vie en dépend vraiment. Parce que cette fois, c’est peut-être la dernière.

    - Meurs pas putain. Meurs pas, d’accord ? Moi aussi je t’aime tu sais. Me laisse pas. Je t’en supplie, me laisse pas ...

    Je me relève vivement, le soulevant dans mes bras. Mes jambes fusent vers la voiture. Elle était si proche. Tellement proche. Mes gestes deviennent mécaniques, guidés par le vampire froid qui demeure en moi. J’ouvre la portière côté passager. J’y dépose Az avant de me retrouver derrière le volant en un clignement d’œil. Je récupère les clés dans la poche de sa veste. Ce faisant, j’attrape sa paume pour l’appuyer contre le pansement de fortune déjà imbibé de rouge.

    - Il faut que tu appuies, pour ralentir la perte de sang …

    Mes lèvres se serrent. Il en a perdu tellement, du sang. J’ai l’impression de me tenir au-dessus d’un gouffre, seulement retenu par la force faible d’une brindille. Qu’est-ce que je vais faire maintenant ? Rentrer à la maison ne résoudra rien. Rien du tout. Je ne suis pas médecin. Cette entaille est beaucoup trop vitale pour se soigner toute seule.

    - Ça va aller Az, je te le promets.

    Je passe une main sur mon visage, sans égard pour les traces carmin que je laisse au passage contre ma peau. J’ignore si je mens plus pour lui que pour moi-même. Et puis soudain, quelque chose me pousse à venir récupérer son téléphone portable dans ses poches. Je démarre la voiture, enclenche la première vitesse, et écrase sans plus tarder la pédale d’accélération. La Ferrari gronde furieusement dans la nuit. Le bolide détale à toute allure sur la route. Mes doigts allument le cellulaire et pianotent sur l’écran. Je fouille dans son répertoire. Une foule de noms dévalent devant mes yeux. Az connaît énormément de monde. Il y a bien quelqu’un là-dedans qui pourra m’aider. Mais … qui ? Mon attention se focalise brutalement sur le prénom que je reconnais comme appartenant à une sorcière qu’il a déjà évoqué devant moi. Je déglutis. Je n’ai plus rien à perdre. Mon pouce lance l’appel alors que je pousse la voiture plus vite encore à travers la campagne.

    - Allô ? Oui ? Agnès ? … Non, je … Azenor est blessé.

    Je prends une profonde inspiration pour rassembler mes idées. Rester concentré.

    - Il s’est fait transpercer par une lame en argent. Ça saigne énormément et … Il faut que vous l’aidiez.

    Je tressaille, me laissant gagner tout entier par une salve de tremblements. Merde. Je ferme les yeux un instant avant de les rouvrir sur la route. Cette femme est mon seul espoir. Elle parle. Elle me questionne. Je sens d’ici sa méfiance.

    - Ecoutez. Je sais que vous n’aimez pas les vampires. Je sais aussi que j’peux pas prouver ce que je suis en train de vous raconter. Mais il va crever, putain. Il est en train de mourir.

    Ma voix se casse malgré mes efforts pour me contenir. Mon regard plane brièvement sur Az sur le siège passager. La souffrance que je lis sur ses traits me broie de l’intérieur. Qui suis-je pour lui infliger ça ? C’est tellement égoïste. Il ne mérite pas d’agoniser comme ça. La femme reprend la parole, m’arrachant à mes pensées mortuaires. Az m’avait raconté qu’elle déteste les suceurs de sang. Lui seul semble faire exception à la règle. J’ose à peine y croire lorsqu’elle accepte finalement de venir l’aider.

    - Dans dix minutes, chez lui ?
    je répète avant de me reprendre, m’accrochant avec force à ce nouvel espoir. Cinq minutes.

    Je raccroche. Je passe une autre vitesse et écrase de plus belle la pédale d’accélération. La voiture hurle sous le silence des étoiles. Mais pas autant que mon cœur en déclin.
    Azenor de Castellane
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    Night of the Hunter ♦ Azeven Empty Re: Night of the Hunter ♦ Azeven

    Mer 6 Nov - 19:18
    La voix de Nev me saute aux oreilles. Elle me semble beaucoup trop lointaine, se perd tel un écho désagréable dans ma tête. Je réalise à peine sa présence à mes côtés. Il me relève la tête, me force à le regarder. Un voile encombre ma vue. Elle se trouble sur son visage si proche du mien. Je comprends ce qu’il me dit, tente de lui répondre, mais aucun son ne sort de ma bouche sanguinolente. Ma main libre glisse à la rencontre de la pointe me transperçant le corps. Il faut... Il faut enlever ça. L’argent me brûle, m’empêchant d’articuler le moindre mot jusqu’à ce que Neven quitte ma vue. Mes pensées sont trop confuses pour réaliser pleinement ce qui se passe. Je murmure son prénom entre mes lèvres, tente de le ramener à moi. Mon dieu, j’ai tellement de choses à lui dire, tellement de mots que je n’ai pas eu le temps de prononcer. Je frissonne, oscille entre le brûlant que me procure la lame et le froid mordant de la mort venant doucement mais sûrement à ma rencontre. Je vais mourir, bordel. 

    Puis, en un coup, mon cri s’échappe de ma bouche, mon regard est exorbité. La sensation brûlante s’envole en même temps que l’arme qui m’est arrachée de la poitrine. Je suffoque, n’arrive plus à respirer correctement. Ma vue se trouble un peu plus. Je veux lui dire tout ce que j’ai sur le coeur. Qu’il sache à quel point je l’aime, à quel point il a pu changer ma vie ses derniers mois, qu’il lui a redonné un sens perdu depuis des centaines d’années. Mais je n’y arrive pas. Le sang envahi ma bouche, dégoulinant au sol. J’ai froid, horriblement froid. On m’enrobe, passe quelque chose sur mon corps, compressant ma blessure. Je grogne à peine. Le sang semble moins s’écouler d’un coup. J’entends sa voix me dire qu’il me ramène à la maison, me supplier de lui répondre avant qu’il ne me relève. Je me laisse faire, me laisse aller contre lui, n’étant plus qu’un pantin incapable de faire quoi que ce soit d’autre tandis qu’il me sert fortement contre lui. Mon coeur bat de plus en plus lentement dans ma poitrine, bercé par ses mots, ses supplications, ses mots d’amour chahutant mon coeur. Je tente de caresser son visage, de retrouver l’éclat de ses iris, de lui faire comprendre à quel point tout ce qu’il fait est vain. Je vais mourir. D’ici quelques minutes. Et je ne regrette rien. Rien du tout. Je lui ai sauvé la vie. Il se met en danger en restant ici. Je ne veux pas que d’autres lui saute dessus. Je ne veux pas qu’il prenne le moindre risque. Qu’il me laisse ici, me vider de mon sang, qu’il me dise au revoir comme il se doit, tout ça me parait bien plus réaliste que ses tentatives vaines de me garder en vie.

    « Neven... »

    Ma voix n’est pas assez forte. Il n’entend pas, soulevant mon corps telle une plume, m’emportant loin du carnage que j’ai produit. Mes yeux se ferment, se rouvrent, encore et encore. Une fois sur la voiture, la seconde sur lui, au volant, me regardant de ses beaux yeux en me bougeant encore, glissant ma main contre mon ventre, me demandant d’appuyer. Je m’exécute, je crois. J’ai tellement envie de dormir... Sa voix résonne, lointaine. Il parle à quelqu’un. J’ouvre péniblement les yeux pour constater qu’il est au téléphone. Le prénom d’Agnès me reste en tête quelques secondes avant que mon regard ne se referme à nouveau.

    Des flashs prennent vie devant mes yeux. Je revois mon père et mon frère, nos parties de cartes endiablées, son rire, son regard brillant de malice se mariant au mien. Le visage d’Elisabeth s’invite à son tour, ses cheveux blonds ondulants dans le vent, mes doigts caressant son visage d’ange, le champ de blé juste derrière chez nous. La naissance de mes filles, la joie incroyable de les tenir dans mes bras la première fois. Les voir courir dans les champs, se cacher dans la forêt, attendant que je les cherche. Voir l’une d’elle plongée dans un livre, comme à son habitude. Je nous revois au coin du feu brûlant dans la cheminée, leur racontant une histoire, captivées par ma voix jusqu’à ce qu’elles s’endorment. Ma première mort, à cette fameuse soirée endiablée, mon retour auprès d’elles, la folie d’Elisabeth. Le décès de nos enfants, par sa faute et surtout, par la mienne. Ma descente aux enfers, ma folie meurtrière. Les guerres, les massacres, le sang, tellement de sang...

    J’ouvre les yeux faiblement. Je reconnais les escaliers de notre immeuble. Je me laisse porté par Neven. Mon regard atterri dans ses cheveux, détaille son visage. Mon dieu, comme je peux t’aimer, si tu savais Neven. La porte s’ouvre, il me dépose sur un support moelleux. Je grimace sous la douleur, me perds dans mon esprit cherchant à quitter mon corps à chaque seconde. Les images s’enchainent dans ma tête. Mes voyages, mon tour du globe, tout ceux que j’ai pu rencontrer, ceux que j’ai pu aider, aimer ou détester avant de me retrouver ici, dans cet appartement, presque sans un sou en poche. Le Fuse, son regard qui m’emprisonne. Ce putain de regard. Jamais aucun homme ne m’aura autant fait vibrer. Jamais je n’aurais été aussi heureux qu’avec lui. Jamais mon coeur n’avait autant battu pour quelqu’un avant lui. Son regard m’accroche, il me transporte. La première fois qu’il m’a avoué ses sentiments. 

    « Je t’aime tellement Neven. »

    Je ne sais pas si il m’a entendu. Je ne suis même pas certain d’avoir réellement prononcé mes mots. Je sens mon coeur réduire ses battements, mes paupières se faire bien trop lourdes pour que je lutte encore. Je t’aime, Neven.
    Neven E. Miller
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    Night of the Hunter ♦ Azeven Empty Re: Night of the Hunter ♦ Azeven

    Mer 6 Nov - 20:38
    Les amortisseurs de la voiture protestent vivement alors qu’elle grimpe abruptement sur le trottoir. Les pneus crissent dans un vacarme désagréable contre l’asphalte. Je prends à peine le temps de retirer les clés du tableau de bord. Je suis déjà dehors, la porte passagère ouverte. Mes bras repassent derrière les épaules et les genoux d’Az pour le récupérer contre moi. Je sers tellement la mâchoire depuis tout à l’heure que les muscles de mon visage sont complètement endoloris. Mon amant a fermé les yeux lorsque nous avons atteint la ville. Le sommeil de mort dans lequel il a sombré m’effraie beaucoup trop pour que je veuille y penser. Alors je sers les dents. Fort. Parce que rien ne doit sortir maintenant. Parce que je suis incapable de prédire comment je pourrais réagir, si je me résous maintenant à le laisser partir. Je ne le laisserai pas mourir. Je verrouille rapidement la Ferrari avant de fondre jusqu’à la porte de l’immeuble. Je m’en fou de la laisser là. Je m’en fou si elle se fait embarquer par la fourrière ou par je ne sais quel connard. Je lui en repayerai une, s’il faut. Hein Az. Fais en sorte que je te repaye une voiture putain. Fais en sorte d’être là pour que je puisse le faire. Mes baskets avalent les escaliers. La porte de l’appartement se dresse bientôt devant moi. J’ai un mouvement d’hésitation. Les clés sont quelques parts dans ses vêtements. Putain. Ma prise se resserre désespérément autour de lui. Son sang froid coule à travers le cuir de son blouson. Je le sens contre mes bras, contre mon torse. Il est en train de se vider sur le paillasson. Mon cœur se broie de plus bel. J’peux pas le lâcher maintenant. Sers les dents un peu plus fort Nev. Je m’approche de la porte avant de prendre un peu d’élan et d’envoyer un bon coup d’épaule dedans. Le verrou craque sous la force surnaturelle de mon assaut. Le panneau de bois s’écarte vivement, me dévoilant le passage. Je surgis dans le salon. Je dépose Az sur le canapé. Les manettes de jeu volent plus loin. Mes mains palpent précipitamment la blessure. Le bandage de fortune ne retient plus la moindre goutte d’hémoglobine. Son sang sature mon odorat. Ça me rend fou. Complètement fou de panique. Je sens le vampire en moi hurler de détresse à ce simple parfum. Et puis soudain, je croise le bleu de ses yeux. Je me fige, et écoute mon cœur s’effriter. Il s’est réveillé. Mes doigts glissent sur son visage pâle. Si pâle. Si froid.

    - Tu vas t’en sortir, amour. Je te le promets.

    Les mots qu’il murmure dans la faiblesse d’un souffle me ravage de l’intérieur. Ses paupières se ferment de nouveau. Quelque chose se brise en moi. Un sanglot me secoue. Je plaque ma paume tâchée de carmin contre mes lèvres pour l’étouffer. Mes yeux se ferment durement. Mais c’est trop tard. J’ai desserré les dents. Les larmes ruissellent sur mes joues striées de sang. Je vous en supplie, qui que vous soyez. Ne le prenez pas.

    - Moi aussi, Az.

    Ma voix déraye, fêlée par les pleurs contenus au fond de ma gorge. Je presse fortement mon front contre le sien. Les larmes dévalent le long de ma mâchoire et viennent mouiller son visage.

    - Te rendors pas. Tu … tu as besoin de sang.

    J’ignore toujours ce que je suis en train de faire. Je n’ai toujours pas la moindre idée de comment le soigner. Seul mon instinct me dicte ce qu’il faut faire pour lutter contre l’hémorragie. Gagner du temps. Aider sa part vampire à lutter contre la mort qui souhaite récupérer son dû. Je me relève dans un brusque coup de vent. Je renifle et essuie rapidement l’eau qui me noie les yeux. Mes pas m’ont déjà mené jusqu’à la cuisine. Un couteau apparaît dans ma prise alors que je retourne aussitôt auprès de mon amant. Sans hésiter, j’enfonce le tranchant de l’outil dans la chair de mon avant-bras. La douleur me passe à travers, bien insignifiante à côté de la détermination noire qui m’habite. Je laisse la lame dans la blessure pour l’empêcher de cicatriser. Mes doigts recueillent un peu de sang. Je l’essuie sur les lèvres d’Az pour éveiller ses besoins primitifs. Elles sont blanches et sèches sous mon contact. Je frémis, et fais tout pour ne pas m’attarder sur ce détail.

    - Il faut que tu boives, je souffle tout bas en glissant une paume sur son front, puis dans ses cheveux.

    Il flotte dans les vapes. Je n’ai pas le choix. Il doit boire. D’une manière ou d’une autre. Je le réhausse en passant un bras derrière ses épaules. Le tenant contre moi, j’appuie la plaie contre sa bouche. Bois, bordel. J’enfouis mon visage dans sa chevelure sale. Je désespère de retrouver son odeur sous cet amas de sang ferreux. Je désespère de retrouver cet effluve si particulier qui manque terriblement à mon âme affolée. Il ne suffirait que de ça pour me rassurer. Pour me dire que tout va bien. Que rien de mal ne pourra arriver. Parce que c’est comme ça que ça marche quand Az est là. Il n’y a plus aucun danger.

    Un réflexe spontané de son corps assoupi le fait tousser alors que mon sang trace son chemin le long de sa trachée. Un soupir fébrile et silencieux m’échappe. Je le tiens plus fermement contre moi pour continuer à lui faire ingurgiter le breuvage aux propriétés surnaturelles. Je sais au plus profond de moi que ça l’aidera à se battre contre sa blessure. Que ça l’aidera à réparer les chaires déchirées. Sentir ce pouvoir quitter mes veines éventrées pour rejoindre son être m’apaise assez pour que je cesse de réfléchir.

    Ce sont des pas précipités dans l’escalier qui me font relever la tête. Je me crispe. Un feulement menaçant gronde derrière mes lèvres piquées par mes canines alors que je bondis sur mes pieds. Un désir protecteur d’animal blessé boue dans mes tripes. Le vampire refuse toute idée de laisser quiconque approcher Az. Mais je prends sur moi et me démène pour garder mes esprits clairs lorsque l’odeur de la sorcière vient piquer mes narines. Sa silhouette apparaît dans l’encadrement de la porte grande ouverte. Je croise ses yeux. Ses grands yeux marqués de stupeur. Elle s’attarde une fraction de seconde sur moi avant de porter toute son attention sur Az. Quelque chose passe sur son visage. Une frayeur alarmée peut-être. C’est bien vite remplacé par un masque ferme et appliqué. Elle sait ce qu’elle a à faire.

    Et moi aussi.

    Je la laisse me contourner, résistant au besoin de l’écarter et de l’éloigner d’ici. J’ai besoin d’elle. Az a besoin d’elle.

    - Il continue de perdre beaucoup de sang. Ça ne se referme pas.

    Je la suis des yeux tandis qu’elle s’installe rapidement auprès de lui. Ses doigts virevoltent déjà du côté du bandage.

    - Il a besoin de se nourrir. Je m’en occupe.

    La sorcière acquiesce la répartition des tâches, les yeux rivés sur le patient étendu devant elle. Lorsque je reviens les bras chargés de poche de sang, elle a ôté le pansement. Elle touche la peau du vampire d’une manière qui m’ébranle et me perturbe jusque dans ma propre chair. Une inquiétude sourde court sous mon épiderme alors que je la regarde toucher le corps d’Az comme si elle pouvait lire à l’intérieur. Elle semble percevoir certaines choses, comprendre certains signes insaisissables. Je déglutis, statufié à côté du canapé. Soigne-le. Je t’en supplie, soigne-le. Son regard surprend le mien. Soudain, elle paraît mal à l’aise et brise aussitôt le contact visuel.

    - Il est faible.

    Mon échine se hérisse au son de sa voix. C’est doux, clair, bien trop léger pour une conversation aussi lourde et macabre.

    - L’argent qui l’a blessé a touché plusieurs organes vitaux. Son corps tourne au ralenti. C’est pour cette raison qu’il n’arrive pas à guérir par lui-même.

    Les poches de sang tombent sur le tapis alors que je fonds à genoux devant elle. Ma main s’abat sur son épaule. Je greffe mes yeux au fond des siens.

    - Sauvez-le.
    - Je …

    Agnès regarde Az un instant et semble chercher ses mots. L’état du vampire l’alarme. Ça ne fait que confirmer ce que j’avais déjà deviné. Son état est grave, particulièrement grave. Il ne pourra pas s’en sortir tout seul.

    - Par chance, le cœur n’a pas été atteint. Sans cela, j’aurai été impuissante ...

    Mes doigts pressent un peu plus son épaule. J'inspire fébrilement, sans l’avoir lâché un seul instant de mon regard franc et implorant.

    - Sauvez-le, je répète dans un murmure. C’est tout ce qui compte.

    De précieuses secondes s’écoulent durant lesquelles ses prunelles restent ancrées dans l’étau des miennes. Elle doit déceler ma détresse. J’ignore si les sorcières savent lire les émotions ou pressentir les intentions. En revanche, celle-ci doit comprendre que j’en mourrai, si elle ne le sauve pas. Ma prise quitte subitement son bras alors que je me détourne vers Az. D’un geste mécanique, je perce une poche de sang et la presse contre ses lèvres inanimées. Il doit récupérer tout ce qu’il a perdu. Il doit recouvrer des forces. Agnès s’anime. Du coin de l’œil, je la vois poser délicatement ses deux paumes contre la lésion béante. Le sang glisse entre ses doigts de porcelaine. Je serre les dents, encore, priant pour ne pas regretter de lui avoir fait confiance. Sa bouche prend vie. Elle susurre des mots incompréhensibles, venus d’un autre univers. Je frémis. Quelque chose d’infime semble tressaillir en Az. Je l’observe avec crainte, mais je ne prends pas le risque d’intervenir. Ses traits sont tirés, et ses sourcils froncés. Les formules qu’elle prononcent s’accentuent et s’emballent sur sa langue. Je n’avais jamais vu de sorcière à l’œuvre jusqu’à présent. Et j’aurais aimé savoir si cette expression de lutte acérée sur son faciès est tout à fait normale.

    De longues minutes s’écoulent. Les poches se vident à mes pieds, une à une. Il me semble voir quelque couleurs réapparaître sur le visage du vampire. Mais je n’en suis pas sûr. Mon cœur meurt d’espoir. Bien trop pour que je puisse véritablement me rendre compte de cela. Mon regard reste rivé sur son faciès endormi. Les paupières d’Az refusent de se rouvrir une nouvelle fois. La douleur ne le martyrise plus. C’est le seul réconfort dans lequel je me réfugie, alors que mon esprit s’applique à graver dans ma mémoire chaque détail de sa figure. De l’angle parfait de sa bouche jusqu’au moindre grain de peau. Les chuchotis d’Agnès me bercent comme un chant païen. Plus le temps passe, et plus j’ai l’impression de sombrer dans un enfer sans fin.

    Et enfin, elle se tait. Je manque de sursauter tant ce silence brutal m’apparaît effroyable. Je me tourne vers elle malgré la crainte qui me paralyse le ventre. Malgré la crainte d’être confronté à ce que je redoute d’entendre.

    - Il ne saigne plus.

    Elle soupire. Elle semble éreintée. Mon attention vole jusqu’à la blessure guérie de toute hémorragie. Elle a raison. Il ne saigne plus. Mon palpitant cogne contre ma cage thoracique. Ce n’est pas exactement ce que je désespère d’entendre.

    - Je vais recoudre la plaie, ajoute-t-elle dans un souffle. Azenor est toujours faible. J’ai réparé les dégâts que je pouvais atteindre. Pour le reste, c’est à son corps de reprendre la main. Ecoutez, je …

    Sa main effleure mon bras. Je sais que je ne vais pas aimer ça. Alors je fais tout pour ignorer les larmes qui me brûlent sans scrupule.

    - Il est plongé dans un sommeil qui n’a rien d’ordinaire. Il n’y avait pas d’autre alternative pour lui laisser une chance de reprendre des forces et de s’en sortir. Je ne peux rien faire de plus et … Je … Je ne sais pas s’il se réveillera un jour.

    Ses paroles pèsent lourdement sur ma conscience. Pourtant, c’est comme si mon esprit refusait de les comprendre. Je reporte mes yeux sur le visage d’Az et hoche plus ou moins la tête. Je suis foutrement incapable de desceller mes lèvres. Le poids fatidique du destin s’écrase sur mes épaules. Je le sens clairement me rattraper de ses bras sans pitié. Il perce la bulle d’ivresse et de légèreté qui m’a protégé ces derniers mois. Il la fait voler en éclat. C’est étouffant et … ça m’éteint comme une flamme soufflée par un vent bien trop fort. Mon bras se lève pour se poser sur le buste du vampire. Lentement, j’attrape par-dessus le tissu sale de son tshirt le médaillon caché sous ses vêtements. Je le serre doucement. Sans un mot. Réveille-toi. C’est tout ce dont j’ai besoin. Réveille-toi. Il le faut.

    Il le faut.
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